De Caldera à Viña del Mar

Publié le par Paloma

A Caldera, je quitte la très sympathique famille Galvez sans tristesse, car je sais que je les retrouverai chez eux à Viña del Mar. Le désert est en gros derrière moi et je ne devrai prendre plus qu'une fois le car, pour aller de Copiapo à la Serena.
Je revis comme une plante qu'on arrose en traversant vergers, pinèdes, vignes et surtout, petits villages. Ca sent l'épineux et l'herbe fraîchement coupée, je m'en remplis les naseaux. C'est ici qu'on produit le fameux Pisco, eau-de-vie de raisin et, tout comme au Pérou, boisson nationale. Dans la vallée de l'Elqui, les vignes tapissent le fond et les coteaux de la vallée sur des dizaines de km.P2250268.JPG
Le Nord du Chili jouit d'un climat sec et sans nuages et de l' absence de toute pollution lumineuse; ceci en a fait un lieu privilégié pour l'installation d'observatoires astronomiques. A celui de Mamalluca, j'ai observé avec ravissement les anneaux de Saturne, Mars, des groupes d'étoiles, et ai fortement augmenté mes connaissances générales plutôt pauvres en astronomie. Nous avons pu voir la station spatiale internationale, semblable à une étoile filante et qui passe au-dessus de l'observatoire toutes les 67 minutes!

Le 25 février est à marquer dans les annales de mon voyage... Piste facile de 46 km, d'après la préposée à l'office du tourisme, entre Vicuña et Hurtado. Il y a fort à parier qu'elle n'est même jamais montée sur une trottinette... Piste de pierre, de sable, paysage désertique, 3 cols à passer, absence d'eau... 2 Suisses très sympathiques m'ont dépassée après une heure. Petite causette au milieu de la piste déserte et don de 1,5L d'eau. Plus loin, un adepte de la Difunta Corea (voir articles sur l'Argentine) me donne encore de l'eau, me prédit une piste très dure et une arrivée vers 16h30! Une cycliste avertie en vaut 2. Après 19 km, au milieu du désert et sous le regard d'un autre observatoire astronomique surgit une oasis avec des vignes! P2250277.JPGJe suis déjà bien fatiguée et envisage de proposer d'y travailler un jour ou 2 en échange des repas et du logement. Dans le hangar, une vingtaine de femmes travaille à mettre en caisse du délicieux raisin destiné à l'exportation, sous le regard de 5 hommes qui se croisent les bras... Je me refuse à être une femme de plus à observer et repars avec une grosse grappe de raisins absolument délicieux... 
Plus loin, ça grimpe ferme et je suis obligée de pousser mon vélo la plupart du temps; ça ne m'arrive normalement qu'en toute dernière extrémité. Pousser le vélo pendant 20 mètres, s'arrêter, mettre le vélo sur sa béquille, souffler, reposer les bras, relever la béquille, repartir, j'ai fait cela des centaines de fois! Mes avant-bras se plaignent, la béquille de mon vélo en a marre, mes sacoches tentent de déstabiliser mon vélo, mon regard ne voit pas la fin de la piste.  Une voiture de Français arrive, ils veulent m'aider mais leur voiture déborde de tous côtés; moi, j'ai assez d'eau, du raisin, et personne ne peut remplacer mes mollets... La dame se tord les mains de désespoir face à mon sort et moi, je la rassure en prenant un air cool... Ils pensent qu'on est à plus de 20 km du but et je leur réponds que c'est impossible car cela signifierait que j'ai parcouru les derniers 7 km en 4h! Au col suivant, il s'avèrera qu'ils avaient raison! J'ai donc battu mon record d'escargot! Au 3ème et dernier col, 3 Chiliens m'offrent des pêches, j'inspire pitié à tout le monde.P2250284.JPG
 Il me reste 20 km de descente et j'aperçois tout au fond du superbe panorama un petit triangle de verdure, but de la journée. Les derniers 20 km, je fais fi du sable, des pierres, je fonce à travers tout, effectue des dérapages en règle, déplaçant des nuages de sable et de poussière, heat and dust... En 45 minutes, j'arrive au village et me sens prête pour les prochains championnats de VTT! J'ai croisé 6 véhicules sur la journée, merci à eux et à leur sollicitude...

Après cela, la piste me semble facile, ça descend légèrement dans de jolies vallées pleines d'arbres fruitiers. Les maisons sont petites, souvent en contre-plaqué, les gens ont rarement une voiture, alors que la vallée semble florissante. P2270297.JPGJe visite un petit canyon plein de pétroglyphes, dessins et mortiers creusés dans la roche vers le 2è siècle. Plus loin, je reprends la Panamericaine et me réjouis de son bon état, de la large bande d'arrêt d'urgence construite exprès pour moi (je n'ai croisé aucun cycliste au Pérou et au Chili), de la faible circulation et de la prudence des camions.
La cordillère tombe dans la mer, l'océan essaye vainement de monter à l'assaut de la Cordillère, la route ondule furieusement et je traverse des petites stations balnéaires tantôt huppées, tantôt glauques. C'est la fin de l'été et des grandes vacances, les campings se vident et ça m'arrange bien.  Mais l'avant de mon vélo grince, prélude à la rupture de l'axe de la roue avant! Premier pépin à mon vélo, un peu prématuré (je n'ai fait que 14.500 km) mais vite résolu grâce à la présence providentielle de Fran, réparateur de vélo dans un minuscule village. Ces villages sont pleins de surprises car la veille, j'avais rencontré dans un village où aucun touriste ne s'arrête une dame qui connaissait une infirmière belge à Viña. En fait, Rosa était l'ancienne nounou de Sergio! Le monde est vraiment petit...
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Après 9 jours intensifs de vélo, je retrouve Ruth, Sergio et leurs 2 enfants, Marie-Anne, ancienne condisciple de l'école d'infirmiers et Christel, ancienne infirmière de la salle de réveil. Beaucoup de vieux souvenirs à évoquer. Je profite de l'hospitalité de la famille Galvez pour me reposer, manger, bavarder longuement... 6 merveilleux jours de vacances grâce à eux. A l'hôpital où travaille Sergio, je retrouve plusieurs médecins qui sont passés par St-Luc.

Les Chiliens sont très courtois, aimables, et j'adore quand ils me disent "que le vaya bien" (que tout aille bien pour vous), ce qu'ils font à chaque rencontre. Ils cuisinent à merveille poissons, coquilles Saint-Jacques, chaussons fourrés aux crevettes et fromage de chèvre et concoctent de délicieux jus de fruits. Ils ont quelques difficultés à dire "je ne sais pas" quand on les questionne sur un itinéraire. J'en ai fait souvent l'expérience mais c'est plus fort que moi, je leur demande souvent comment est la route et à tous les coups, ou presque, ils sont d'un optimisme délirant et me prédisent 2 heures pour un trajet qui m'en prendra 8!
Le Chili est le pays le plus développé d'Amérique du Sud mais le plus démodé en matière d'uniformes scolaires. Je ne cesse de m'étonner de voir des écolières en chasuble informe, avec cravate, veston et grosses guêtres en laine qui tire-bouchonnent sur les jambes. Incroyable! L'alternative est la jupe écossaise à petits plis... Je vous promets une photo.
Les cartes routières Copec sont nickel, précises, et de la taille de mon porte-carte. On trouve des campings un peu partout, bien aménagés, ce qui allège mon budget général car le Chili est un pays plus cher que ses voisins.
Je suis descendue en car jusqu'à Puerto Montt et vais remonter jusqu'à Santiago à vélo par le chemin des écoliers. C'est le début de l'automne et je préfère aller du frais (le Sud) vers le plus chaud (le centre). Le ciel est bleu, l'air vif, mais il paraît que le temps peut changer très vite.
 
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C
Chapeau bas la nurse!!Ca à l'air encore plus dur de gravir ces pentes assechées que de tenir comme infirmiere aux soin-intensifs...On souffre pour toi et on sent que les pauses vacances et zone de repos sont sirotées avec bonheur et délectation.Faurdra penser à se refaire qq kg sinon tu pourra bientôt te cacher derriere ton vélo mais je suis sûr qu'on te l'a déjà dit alors je m'éclipse en te souhaitant encore bcp de  bonnes choses.QUE LA FORCE SOIT AVEC TOI...claudio du cvi
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P
Quand je m'inscris dans une auberge, je ne note jamais "infirmiere" dans la rubrique profession, mais bien "ciclista". Et ca ne fait tiquer personne ... Je ne souffre pas, je me complais dans les difficultés, enfin ... presque toujours. Je me suis trouvé une famille d'accueil pour le WE de Paques, tout est pour le mieux. 
F
JOYEUX ANNIVERSAIRE! Depuis un an sur ta bécane, c'est fabuleux.     Françoise
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P
Bientôt un an, c'est vrai, mais toujours autant d'indécision concernant la suite du voyage... Je ne peux que vivre au jour le jour et profite au maximum de ma très grande liberté.